La Foire de Millianes - Site Poèmes & Diaporama de L'Arié...Joie

Bienvenue Chez Arié...Joie
Aller au contenu
Les News
La Foire de Millianes

Il était une fois, Pamiers s'étirant dans le rougeoiement des fours et des laminoirs,
Se réveillant au son des cloches de Notre Dame du Camp, vibrant au son du marteau pilon et ses coups de boutoir,
Respirant entre les bras de ses canaux au rythme des foires et des marchés sur Millane et sa populace,
Où dès potron-minet , la chorale des meuglements, des hennissements, des bêlements animait la place



La nuit ouvre son rideau sur le grand orchestre de la foire dans le bruissement des feuilles caressées par l'Autan,
L'emplacement des basses Gasconnes et Limousines, accompagnées des voix enfantines des répoupets et des pouparels,
Des ténors Mérens et Castillons, des vibratos et voix clarines des moutons, veaux et agneaux passionnels,
Est l'objet de vives discussions, parfois de macarel et millodiou n'ayant rien à voir avec la musique d’antan.


La foire commence dans le concert animalier par des gestes, sous l’ampleur de leur blouse, à atteindre les étoiles,
Éleveurs, maquignons, agriculteurs exposent leur point de vue avec une mauvaise foi des plus sincères, proverbiale,
Ils discutent, marchandent, évaluent, soupèsent, troquent, partent et reviennent
Jusqu'au claquement de la rencontre de deux mains concluant l'accord sous la foi du serment des terriens.

Le maréchal-ferrant, le forgeron, le rémouleur, l'étameur, le sabotier, le cordonnier, le vannier, le rempailleur,
Fourbissent leur outillage, droits dans leur tablier, ils s'apprêtent à affronter des fers usés et accessoires du labeur,
Un couteau dentelé, une casserole percée, un panier troué, une chaise hirsute, un sabot bancal, une chaussure béante,
L’œil de vautour du peilharot guettant l'impuissance de l'artisan, passeport de l'objet terminant dans sa carriole itinérante.

Les commerçants ont installé leurs tréteaux, perchés sur un banc, les camelots racolent les badauds,
Ils les inondent d'un tsunami de paroles sans la moindre hésitation, dans un défi permanent arithmétique
Ils additionnent, soustraient, multiplient divisent les prix pour l'éventuel achat d'un ustensile miraculeux et pratique
L'heureux acheteur avec cet objet aux performances extraordinaires solutionnant les tracasseries de sa vie sans cadeaux.

Plus tard dans la matinée, l'euphorie d'un portefeuille rempli, anesthésie le sens parfois exagéré, de l'économie,
Une table, trois gobelets, une pièce de monnaie, un habile manipulateur avec adresses les gobelets manie,
Le jeu consiste moyennant une mise en espèces sonnantes et trébuchantes de trouver celui où se cache la pièce,
Un quidam liasse de billets à la main, gagnant à chaque démonstration, attire du monde alléché par un gain en souplesse.

Tout le monde s'empresse de suivre sa mise et là, surprise, son état de grâce se détourne,
Pour réapparaitre avec de nouveaux arrivants, disparaître à nouveau et les gobelets tournent,
La bonne ambiance initiale s'estompe au fur et à mesure que les billets s'envolent des portefeuilles  
Le manipulateur et son comparse plieront boutique, lâchant quelques mises pour effacer le souvenir des pertes d’orgueil.

L'intensité des vocalises de la chorale s'estompe et fait place à quelques cris désespérés d'avis de disparition,
Le champ de foire se vide et les salles et la terrasse du café se remplissent à l’unisson,  
Autour des tables, les discussions soutenues par l'arrivée à haute fréquence de chopines vont bon train,
C'est l'heure de l'arrivée de l'Homme-orchestre, prenant quelques libertés avec les partitions, gardant l’entrain.

Équipé d'une grosse caisse fixée dans son dos dont le goupillon est relié à une cheville,
De cymbales fixées à chaque genou, d'un bonnet entouré de grelots enfoncé sur sa bonne bille,
Il joue de l'harmonica maintenue à hauteur de sa bouche par une armature fixée sur ses épaules de gamin,  
Et s'accompagne à l'accordéon, cela semble relever du miracle, et les spectateurs l'accompagnent en tapant des mains.



Le précurseur de la disco mobile accompagné par un petit animal, un tiers chien, un tiers rat et un gros tiers intelligent
D'une patte agile accompagnée d'un mouvement de tête et d'un regard irrésistible rappelait aux auditeurs distants,
Que son maître et lui ne se nourrissent pas d'amour et d'eau fraîche et doivent subvenir à leurs besoins du moment,
De mémoire de chien, l'artiste n'a jamais quitté une table sans avoir reçu dans sa sébile la reconnaissance de son talent.

Ce spectacle fascinait un petit garçon vif et frisé, mais un sentiment de frustration l'envahissait de ne pas avoir de rôle,
Toujours prêt à se rendre utile, tout le monde l'appelait le « Petit Vignes » du nom de son Grand-père, moins drôle,.
Bien sûr, cette aimable figuration le remplissait de joie, mais elle ne suffisait pas à son bonheur,
Il voulait un vrai rôle et le destin ne tarda pas pour lui apporter une fonction de promoteur.



L’œil amincissant du maquignon et celui grossissant de l'éleveur, imposaient un système plus équilibré,
L’installation de deux bascules de poids publics favorisa ce retour nécessaire à la neutralité,
Servies par un préposé chargé de la rédaction du jugement avec un ticket de pesée
La casquette à visière laissait apparaître les quelques cheveux blancs périphériques qui lui restaient.

D'épaisses lunettes glissaient avec obstination jusqu'au renflement des narines aux couleurs violine,
Il les remettait en place de son index ongulé, au-dessus d’une petite moustache blanche à la Charlot, non choisie,
Ses moues dubitatives ponctuées de mouvements de tête latéraux ou verticaux, lui permettaient de donner son avis,
Sans dévoiler ses gencives édentées tout en masquant ses difficultés d’élocution dues à l'absorption de chopines.

Les vêtements d'une sobriété et d'un classicisme parfait semblaient vouloir atténuer l'aspect caricatural du personnage,
Une grosse chemise à carreaux, un gilet de flanelle noir sans manche avec, sortant d'une poche sans âge,
La chaîne d'une montre gousset, un pantalon de velours soutenu par un large ceinturon de cuir avec révérence,
Et enfin les fameux brodequins de cuir, véritables bottes de sept lieues propulsaient Louis aux limites de l'élégance.



C'est ainsi que l’ancienne place des « prés de la ville » est devenue en 1874 le Champ de Mars à l’Occitane,
Dans les années 1900, s’y sont déroulées des corridas puis, en 1920, on aménage les jardins de Milliane
La place Milliane devient alors le cadre des grandes fêtes et des spectacles à grand succès de population,
Elle verra se tenir après 1945, sous ses beaux platanes, deux foires aux bestiaux mensuelles de grande réputation.  

Poésie en quatrains rimés de Guy PUJOL, dit l’ARIÉ…..JOIE
Inspirée d’un texte de Michel SUARD, écrivain et conteur Appaméen





                                                                         



Retourner au contenu